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j’ai eu 12 ans en 68 le 21 mai exactement. Mais surtout Mai 68 reste pour moi le mois de ma communion solennelle. J’étais élève en 6ème de l’Ecole Saint Pierre à Fougères (Ille & Vilaine), l’école Saint-Pierre comme on peut s’en douter était une école tenue par des Frères, une école catholique comme on disait en Bretagne à cette époque…Un beau jour de mai les fenêtres de ma classe donnait sur la place de l’Hôtel de Ville. Je me souviens d’une manifestation assez houleuse qui arrivait sur cette place, les fenêtres étaient ouvertes, et nous pouvions entendre, cris, sifflets, pétards. Fougères était à l’époque un ville ouvrière et fière de l’être. A un moment un des meneurs s’est emparé d’un mégaphone et a demandé aux manifestants de ne rien casser et de respecter le bien public et là le Frère/Professeur s’est adressé à nous les enfants: "entendez bien ce que vient de dire cet homme, son message est universel et peut s’adresser à chacun des hommes". Il n’y avait donc pas tant de différences entre le Frère et le Camarade, 40 ans après je m’en souviens toujours. Respect et tolérance..

Un autre souvenir. Les Frères et les professeurs de Saint-Pierre ne faisaient évidemment pas grève, sauf que par la force des choses (pénuries d’essence, manque de transport pour les profs et les élèves,..) l’école a elle aussi été obligée de fermer provisoirement ses portes sauf …sauf pour ceux qui, comme moi, préparaient la communion, c’était ce qu’on appelait la "retraite de communion". Prières, témoignages, répondre à cette terrible question : "pourquoi fais-tu ta communion ?" et surtout ne pas faire la réponse qui était pourtant la plus vraie "pour les cadeaux"…donc tous les matins j’allai à cette "retraite" pendant que les copains me regardaient, goguenards et heureux eux de profiter de ces jours de vacances volées. Je me souviens aussi que mon père non plus ne travaillait pas par la force des choses et lui aussi jouissait de cette Liberté…même si nous n’avions plus d’essence à mettre dans la voiture et que nous ne pouvions donc aller nous promener dans la splendide forêt de Fougères. 

Ma communion est arrivée, bien entendu tous les invités (les cousins de Paris) n’ont pas pu venir. Mon parrain aussi manquait. Déjà en 1956 il n’avait pas pu être à mon baptême, mobilisé par d’autres évènements, ceux de l’Algérie… La en 1968 il était encore mobilisé par des évènements.. Mais bon j’ai eu la montre, la gourmette, la chevalière, le poste de radio, et l’appareil photo que j’espérais.

Pour conclure 1968 pour moi c’était à cette époque un mélange de liberté, de vacances, de soleil (je ne sais pas si c’est un tour de ma mémoire ou si c’est la réalité mais je vois ce mois de mai sous le soleil…) et aussi de peur… A cette époque dans cette Bretagne chouanesque, la peur du Rouge ca existait vraiment ! 

Mai 1968 c’est aussi la porte qui s’ouvrait sur une formidable mais courte décennie, les années 70 (qui se sont arrêtés en 75 ou 76) mais ca c’est une autre histoire….

PS : la musique de mai 68 ? un formidable album de Léo Ferré, "Et Basta…" et un disque aujourd’hui introuvable mélange de musique électronique et de bruits de la rue en colère "fait que ton rêve soit plus long que la nuit" de Vangelis….(eh oui).

Jean-Pierre Danrée

Mai 1968

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